Luce Couillet : "J'aime travailler la matière brute pour en faire un tissu précieux"
Rencontrée lors du salon Maison&Objet de septembre 2017, Luce Couillet, designer textile, dévoile son travail, ses inspirations et nous explique ce qu'être designer aujourd'hui signifie. Interview.
Mise en avant au côté de 7 autres Rising Talents, Luce Couillet est née en 1985. Après avoir étudié le design produit à l'ESAD de Reims, elle concentre son travail sur la conception textile, à son entrée à l'ENSCI (Ecole Nationale Supérieur de Création Industrielle) à Paris, d'où elle sort diplômée en 2010. Spécialisée dans la conception de matières, matériaux et produits textiles, en architecture d'intérieur, comme en décoration, elle vit et travaille aujourd'hui entre Aubervilliers et Paris.
Journal des Femmes : Présentez-nous votre travail.
Luce Couillet : Sur métier à tisser, je crée de nouvelles matières à partir de matériaux très variés - du bois, du cuivre, du coton, de la chambre à air de vélo, de la mousse néoprène… - tout ce qui peut être transformé. L'idée ? Travailler sur des mélanges, entre des choses très techniques, et d'autres, plus naturelles et jouer l'hybridation à fond pour aller jusqu'au produit fini.
Vos créations sont-elles toutes réalisées à la main par vos soins ?
Il y a des choses qui ne peuvent être faites qu'à la main. Généralement, je passe par une étape qui consiste à monter une chaîne d'essai sur métier à tisser. Après, en fonction des matières que je vais utiliser, il y en a certaines qui peuvent être mécanisées. Mais pour une création avec du bois, par exemple, je travaille à partir de plaques qu'il est nécessaire de façonner à la main. Pour d'autres matériaux en cours de développement, il peut m'arriver de réaliser des découpes numériques, que je tisse les unes avec les autres par la suite. Tout dépend du produit et du projet qu'il y a derrière, c'est vraiment au cas par cas. C'est du sur-mesure.
Qu'est-ce qui vous inspire ?
J'aime aller vers des choses qui ne sont pas forcément textiles au départ, j'aime me dire que tout peut l'être ou le devenir. Il y a un côté récup', upcycling et ce qui donne sa valeur à la création c'est la transformation. J'adore la matière brute, la mélanger avec des choses très riches, créer du contraste pour l'amener ailleurs ou lui trouver une seconde vie...
Quels sont les enjeux pour un designer en 2017 ?
Etant donné que la formation est de plus en plus ouverte, il y a beaucoup de monde et il y en aura de plus en plus. La concurrence est rude. L'objectif est donc de se démarquer tout en trouvant sa singularité, ce qui nous tient aux tripes, ce je-ne-sais-quoi qui peut faire la différence. Aussi, j'estime, qu'il faut, dans la mesure du possible, veiller à ne pas s'emprisonner dans quelque chose, un style, une envie et rester ouvert. C'est d'autant plus vrai quand on est indépendant. Trouver le juste équilibre est un vrai défi. Évoluant dans un marché très luxe, j'essaie de m'intéresser à des matières que l'on n'attend pas forcément.
Quels sont vos projets pour la suite ?
Après avoir travaillé avec Création Baumann, la Manufacture Cogolin et un moment en Haute Couture, j'ai rejoint, à mi-temps depuis janvier 2017, Dines, qui façonne et distribue des revêtements de sols – tapis et moquette – adaptés à des projets sur-mesure. Dans les mois qui viennent, je vais développer et organiser tout le département textiles et j'ai aussi des co-projets avec des architectes. A plus long terme, j'aimerais continuer la recherche sur des domaines plus techniques - le médical, le sport, par exemple - des univers sur lesquels je n'ai pas réussi à me pencher jusqu'à présent. Ce sera un investissement à 100%.
Site : www.lucecouillet.com