Chantal Hamaide, ambassadrice de l'Espace Design à Foire de Paris

La rédactrice en chef du magazine Intramuros est en charge de la direction artistique de l'Espace Design de Foire de Paris. Elle nous décrit cette nouveauté 2014 du salon parisien et nous explique sa vision du design aujourd'hui.

JournalDesFemmes.com : Que trouvera-t-on sur l'Espace Design de Foire de Paris ? Que pourra-t-on acheter ?
Chantal Hamaide : Foire de Paris a invité le magazine Intramuros, dont je suis la rédactrice en chef, à participer à cet espace de 600 m². Nous leur avons proposé deux choses : une exposition, pour le côté pédagogique, et un magasin, puisqu'à Foire de Paris, tout se vend. On pourra y acheter plusieurs produits, de la chaise à l'accessoire, en passant par la lampe et la vaisselle, de marques de design françaises et étrangères. Sur le plan de scénographie, ces deux zones seront côte à côte et de même importance en termes de surface. On a voulu les lier entre elles pour que les visiteurs voient les objets et puissent ensuite aller acheter d'autres objets en lien avec ce qu'ils viendront de voir. Et autour, bien sûr, il y aura de nombreux exposants.
Concernant l'exposition "Chaises en jeu", nous sommes partis sur l'idée du matériau. C'est parce qu'il y a un nouveau matériau ou un nouveau procédé de traitement de ce matériau que l'on fait un nouveau produit. On a donc choisi dix matériaux : l'acier, l'aluminium, le bois, le composite, le cuir, le feutre, la mousse, le plastique, le rotin et le textile. Cela montre aussi que suivant la matière, le dessin n'est pas le même. Trois chaises seront présentées par matériau, pour montrer la pérennité du design : certains produits, par exemple, ont plus de 20 ans ou 40 ans. A chaque fois, ils seront associés à deux produits récents pour une réinterprétation du matériau.

Pourquoi avoir choisi la chaise comme objet d'exposition ?
La chaise est une chose très importante dans la vie domestique. A un moment donné, au quotidien et même au bureau, on est tous assis sur une chaise. C'est un élément qui porte le corps et qui le repose. C'est aussi un exercice très privilégié pour les designers : c'est un objet très difficile à faire, surtout dans une perspective industrielle. Ce thème intéresse beaucoup les architectes et les designers car c'est une sorte de petite architecture. Dans le cadre de Foire de Paris, la chaise est un élément très compréhensible qui parle à tous.

Quelles marques ?
Il y aura Knoll, Cinna, Tolix, Fermob, Magis, Cassina, Souvignet, Alki, Fritz Hansen, Poltrona Frau, Emeco, Vitra, Planke, Cappellini, B&b Italia, Carl Hansen, Plank, Artifort...

Et quelle est votre chaise préférée ? Ou celle sur laquelle vous vous êtes sentie la mieux assise ?
C'est difficile ! Il y a des chaises qui m'intriguent beaucoup mais ce ne sont pas forcément les plus confortables. La Panna Chair, du Japonais Tokujin Yoshioka, crée une expérience assez drôle autour de la mousse. J'aime bien aussi tout ce qui est en composite car ce matériau tient compte du développement durable : il y a par exemple la chaise Zartan de Philippe Starck pour Magis qui est en poussières de bois reconstituées. J'aime aussi beaucoup Konstantin Grcic et ce qu'il a fait pour Plank : une chaise de collectivité qui peut être déclinée pour l'outdoor avec un traitement de peinture spécifique pour lui permettre de résister aux conditions en extérieur. On aimerait choisir plusieurs chaises !

Comment démocratiser le design, souvent trop cher et parfois difficilement accessible en termes d'esthétisme ?
On a eu une expérience à succès : c'est IKEA. La marque, notamment avec sa collection PS, collabore avec des designers. Mais cela ne fait que retraduire, comme dans la mode avec Zara, tout ce qui est assez pointu et que l'on trouve dans les salons de Milan ou Paris. Habitat aussi est un bon exemple de démocratisation du design. Mais le réel problème selon moi, c'est le prix. C'est très cher. Pourquoi ? Le design est un artisanat industriel et donc les quantités sont moindres. A cela s'ajoutent les recherches à faire sur les matériaux, qui font gonfler les prix. Pour autant, il me semble que le public est assez mûr et au courant. Ce sont peut-être les modes de distribution qui sont à revoir : il faut être présent sur Internet, comme Madeindesign, ou dans des magasins qui proposent des offres plurielles, comme The Conran Shop. Même si l'on n'achète pas un canapé, on repart avec des produits qui iront tous dans la maison mais à différents moments et différents prix.

Paris est-elle une ville importante dans la sphère du design ? Par rapport à Milan notamment.
Ce n'est pas du tout la même chose. A Milan, la manifestation annuelle est internationale. C'est d'ailleurs pour moi la seule ! Vous y croisez des designers et fabricants du monde entier. Dans et hors la foire. Vous voyez aussi des événements, peut-être plus confidentiels, mais intéressants, comme des expositions. Paris est une ville de démonstration. Il y a bien le salon Maison&Objet. Mais Paris est plus séduisante en termes de d'espaces, d'informations, de présentation. L'Italie est un pays qui fabrique. La France beaucoup moins. Nous sommes moins compétitifs peut-être. L'Italie fabrique, Paris montre. Néanmoins, nous avons de très bonnes écoles avec de très bons designers qui sont appelés dans le monde entier.

Quel jeune designer, dont vous saluez le travail, avez-vous découvert récemment ?
Il y a la génération des Bouroullec, qui eux occupent déjà le terrain. Il y a des gens plus jeunes... Je pense à une fille toute jeune, Pauline Deltour, qui a fait des petites collections. Entre Pauline Deltour et les Bouroullec, il y a des gens comme Philippe Nigro, Gilles Belley. ON compte maintenant à peu près trois générations qui sont sur le terrain.